Sentier des Mines du Mont Chemin
Sentier des Mines du Mont Chemin
Sentier des Mines du Mont Chemin
Permis de fouille
Concessions
Le fer
Le plomb et la fluorine
Le plomb argentifère et la fluorine
Le marbre
Le quartz
Conclusion
Le fer

Couloir Collaud, Chez Larze et les Planches


Contexte géologique

Les gisements de magnétite peuvent s’expliquer par le métamorphisme régional hercinien, c’est-à-dire par la naissance des chaînes de montagnes de l’ère Primaire, il y a quelque 300 millions d’années.4

Ils se sont développés dans les gneiss à amphibolite du Massif du Mont Blanc.

Notons parmi les minéraux associés à la magnétite, la
pyrite, le talc, le gypse, la fluorine, la chalcopyrite et l’amiante.

 


 

 

4 Atlas géologique de la Suisse, 1983, feuille Sembrancher, et WUTZELR B., 1983. Geologisch-lagerstättenkundliche Untersuchungen am Mont-Chemin (Nordöstliches Mont-Blanc-Massiv). Clausthaler Geol. Abh. 42, 104 S.

 

Exploitations

Le fer a peut-être été exploité dès l’occupation celte du Valais, si l’on pense au grand nombre de scories laissées dans la forêt (Botza des Sarrasins, Planard, Essert des Creux, Maison Neuve, Combe aux Lièvres etc. (fig. 1)5.

L'extraction a dû se faire au feu ou à la masse jusqu'à l'arrivée de la poudre noire en Suise vers 16506.


 

 

Une industrie sidérurgique est attestée aux Valettes au XVIIIème siècle et au début du XIXème siècle avec Jean-Daniel Lotard de Genève. La famille Piota serait venue du Tessin pour traiter le minerai près du Brocard à Condémines7.

Le fer était alors rentable et a fait la fortune d’Augustin Pinson, fondateur des Forges d’Ardon et concessionnaire des mines de fer du Mont Chemin et de Chamoson8. A. Pinson a obtenu les droits miniers en décembre 1819. Ils passent en décembre 1829 à la Société des Forges d’Ardon. Celles-ci ont traité de 7'500 à 10'000 tonnes de minerai provenant des Planches entre 1842 et 1855.

De 1856 à 1861, l’exploitation reprend dans les anciennes galeries de Chez Larze où 600 à 700 tonnes de minerai sont extraites chaque année9. Puis la Ligne d’Italie porte un coup fatal à l’exploitation en favorisant l’importation de fer étranger. La concession tombe dans le domaine public en août 1873.
 

C’est en août 1917 que Jules Métral (1869-1934), serrurier martignerain, passionné de mines, reprend la concession. Il procède à une magnétométrie de la région et fait creuser quelques tranchées près du Col des Planches entre 1917et 1920 avec l’ingénieur E.M. Bornand, W. Salomon de l’Université de Heidelberg et C. Schmidt de Bâle 10. A E.M. Bornand revient la palme de l’estimation la plus élevée du gisement de fer : 4'800'000 tonnes de minerai !

Tous les droits miniers de J. Métral sont déjà revendus en janvier 1928 pour Fr. 85'000,-- à la S.A. des Mines du Mont Chemin. La nouvelle société est dans les mains du président de la ligne de chemin de fer Martigny-Châtelard, Auguste Boissonnas et des avocats César et William Droin de Genève. Après quelques travaux de remise en état des galeries au Couloir Collaud en 1928, ils entreprennent d’importantes campagnes géophysiques avec l’Ecole polytechnique de Zurich en 1936 et 1937. La Confédération contribue notablement au financement de ces recherches. En 1939, la Société fait creuser aux Planches un travers-banc qui rencontre le gisement.

 


 




 

 

A la fin de l’année, l’ex-colonel russe Paul Dormann rachète pour quelque Fr. 100'000.-- les actions de la Société des Mines du Mont Chemin, grâce à une société luxembourgeoise, Electromines S.A., dont il est l’administrateur. En début 1941, il fonde un holding, la « Société pour le développement des mines et entreprises sidérurgiques » qui regroupe les mines d’anthracite des Etablons et de Champsec, les mines de fer de Chamoson, Guss und Stahl A.G. et la S.A. des Mines du Mont Chemin.

Sous son impulsion, la phase de l’exploitation commence aux Planches. Grâce à son tempérament slave11, son entregent et son dynamisme, les fonds nécessaires sont rapidement rassemblés par l’émission d’actions, d’obligations et par des crédits bancaires.

 

Dormann occupe d’abord les gens de la région; il recrute aussi des Confédérés et dès 1942, une trentaine d’internés polonais12. Cette année-là, où 26'318 tonnes de minerai brut sont extraites, les salaires d’une centaine d’ouvriers s’élèvent à plus de Fr. 310'000,--. C’est aussi en 1942 que l’entreprise Wullschleger construit le téléphérique du Guercet avec l’aide technique de la firme Giovanola. Le minerai était descendu, soit par le téléphérique, soit par camion à la gare de Sembrancher ou à Martigny. Les mines ont consommé de grosses quantités de bois pour la construction des téléphériques, des silos et pour le soutènement des galeries. Une scierie était installée sous le concasseur. L’inspecteur d’arrondissement Charles-Albert Perrig avait fort à faire pour défendre le patrimoine bourgeoisial de Martigny13.

 


 


Le prix de vente de la tonne de minerai ne couvrait de loin pas les frais et salaires engagés. Le prix de revient du concentré à 40 % se décomposait comme suit14 :

Extraction Fr. 29.60

Triage sur place (concassage, tri à la main et par tambour magnétique)

Fr.   7.--
Transport par téléphérique et camion
Fr.   5.50
Transport par chemin de fer Fr.   9.60
Redevance à l’Etat Fr.   0.24
Redevance aux propriétaires des fonds Fr.   0.06
  _________
  Fr.  52. --

 

Le prix de vente franco Bâle se pratiquait entre Fr. 25,-- et Fr. 40, -- la tonne.
Après quelques essais infructueux au Guercet, le minerai était concentré à une teneur de fer de 40% à la fabrique de ciment Hunziker d’Olten.

En 1940, la Société des produits azotés de Martigny utilise ses fours pour la fonte du concentré. La pénurie d’électricité interrompit la production, le 24 octobre. Le concentré fut alors acheminé à Choindez chez Von Roll. Plus de la moitié du concentré est partie directement pour l’Allemagne, la Hongrie et l’Italie dans le cadre des échanges économiques de guerre. P. Dormann se retire de la société en mai 1943 pour des raisons de santé. Charles Odier en devient alors le fermier.

 


 

 

A la fin de 1943, l’activité cesse : 54'000 tonnes de minerai brut ou 33'200 tonnes de concentré à 40 % ont été extraites en quatre ans. Les travaux se sont concentrés aux Planches avec l’excavation de plus de 1'400 mètres de galeries (8 entrées et 3 cheminées). A Chez Larze, 200 mètres de nouvelles galeries sont exécutés à partir des deux anciennes entrées. Elles livrent 9'000 tonnes de minerai brut un peu pyriteux. Celui-ci est acheminé par le câble de la carrière de marbre à Bovernier.

Des anciennes galeries sont remises en état dans le Couloir Collaud où l’on extrait 1'000 tonnes de minerai. Le fer est descendu par un nouveau téléphérique, de la cote de 950 mètres, à la station de Bovernier.

 

En 1949, la faillite est prononcée avec un passif de Fr. 2'647'685,40, soit un déficit de Fr. 80, -- par tonne de concentré. Le prix de revient de la tonne devait donc avoisiner Fr. 110, --. A la fin de la procédure en 1951, la concession retombe dans le domaine public. Le Grand Conseil la redonne le 22 mai 1958 à Joseph Dionisotti, industriel à Monthey, avec celle des Trappistes, après s’être assuré que toute garantie soit donnée à la Bourgeoisie de Martigny pour la conservation de ses forêts. J. Dionisotti connaissait bien le gisement car il avait été administrateur de la S.A. des Mines du Mont Chemin jusqu’en 1940.

Les réserves en place sont estimées à 7'000 tonnes de minerai brut dont 3'000 tonnes à Chez Larze.


 

5 Nous avons fait analyser par le Laboratoire de Géologie de l'EPFL une scorie romaine trouvée près de la Patinoire municipale et une scorie de Planard (analyse du 2.9.1980). La scorie romaine contient du verre, du quartz et probablement de l'hoegbomite 18 R. Elle se différencie notablement de la sorie du Planard qui possède du verre, du quartz, de l'actinote, un peu de calcite et éventuellement de la clinoferrosilite.
6 JENNI J.-P., 1976, Der alte Blei-Silber am Bristenstock in der Schweiz, Anschnitt 23, 3-10.
7 BERTRAND J.-B., 1942, Notes sur le commerce, l'industrie et l'artisanat en Valais avant le XIXe siècle, Annales valaisannes, 4, 544-545. - MICHELET H., 1968. Sur les traces des précurseurs. Industries bas-valaisannes (1800-1850), Vallesia, 23, 163-164.
8 HUGI E., HUTTENLOCHER H.P., GASSMANN F., FEHLMANN H., LADAME G.CH., HÜGI TH. et WOHLERS J., 1948. Die Eisen - und Manganerze der Schweiz. Die Magnetit-Lagerstätten. Beitr. zur Geol. der Schweiz, Geol. Ser. XIII, 4B, 116 S.
9 GERLACH H., 1871, Das südwestliche Wallis. Beitr. z. Geol. d. Schweiz, 9, (voir pp. 54-57) et GERLACH H. 1983, Bericht über den Bergbau im Kanton Wallis vom 15.7.1859. Beitr. z. Geol. Karte d. Schweiz. 17, 3.
Une petite croix en fer portant l'inscription G.O. a été scellée dans le Couloir Collaud à l'altitude de 890 mètres pour rappeler le souvenir d'un convoyeur de minerai qui a déroché.
Le fer de Chez Larze descendu à Martigny sur des traîneaux par le fameux
«chemin de la Mine». Ce raide sentier arrive derrière le cimetière. Le fer des Planches était transporté à Charrat, peut-être jusqu'au lieu-dit «Ferronde».
Les exploitations à Sacellat et Perches datent vraisemblablement de cette époque.
10 SIMON C., Rapport de 1.1938 sur les minerais de fer en Suisse et la fabrication électrothermique de la fonte (Archives cantonales: Fonds 6100/99) et LADAME G.C. 1930, Le Mont-Chemin, étude géologique et minière, thèse N°884, Université de Genève, p. 5.
11 Communication de Francis Darioli, chauffeur de P. Dormann (12.10.1973). Une certaine mégalomanie ne lui était pas étrangère: «Vous voyez ce câble», disait-il à son chauffeur, en montrant le téléphérique du Guercet, «bientôt, je le ferai monter en argent».
12 De nombreux Vollégeards ont travaillé dans les mines de Dorman, - de Chemin: Louis Monnet, Marius Abbet, Marcel , Bernard (mort le 27.1.1942 dans une galerie) et Maurice Puippe (atteint de silicose); - de Vens: Marius et Joseph Terrettaz, Alfred Bruchez, Jules Comby de Chez Larze.
Sembrancher avait aussi son contingent: Etienne, contremaître, Denis, René, François et Clément Métroz, Antoine Ribordy, Paul Vocat, contremaître, Henri Giovanola, forgeron. (Communications de Maurice Puippe, 27.12.1974, de Ludwik Gniazdowski, 7.9.1987 et de Clément Métroz, 8.9.1987).
L'ingénieur Victor Gross de Salvan a dirigé les travaux en 1939 et 1940. Puis Léon Barabasch lui succède. Dès 1942, Albert Boubier prend la relève. André Delasoie, de Sembrancher est son bras droit.
Les soldats et sous-officiers polonais étaient rattachés au lieutenant Henri Beniazkiewicz qui assure l'ordre avec deux soldats suisses. Ils avaient été requis pour travailler aux Planches, parce qu'ils étaient mineurs de formation. (Communication d'Anastase Niedzwiecky, 27.5.1985).
En 1942, Dormann offre un salaire horaire de Fr. 1.40 à Fr. 1.70, pour un mineur qualifié. Pour la nourriture et logement à l'Hôtel du Vélan, il demande à ses ouvriers Fr. 4.-- par jour (Archives communales de Martigny, Mines, document du 30.4.1942). Cette année-là, il fait construire un chalet pour les Polonais, au départ de la route pour le Col du Tronc. Ce bâtiment est aujourd'hui appelé
«Le Ranch» (Communication de Daniel Pellaud, 20.6.1987).
13 Les amendes pour défrichage illicite étaient courantes (Archives communales de Martigny, Mines). La Bourgeoisie de Vollèges a fourni, elle aussi, d'importantes quantités de bois de feu et de coffrage pour les galeries (Archives communales de Vollèges).
14 De Torrenté Ch., Ing. du Service hydraulique (12.2.1940) Archives cantonales, Fonds 6100/99 et Hugi et al. 1948, p. 102.
La comptabilité disparaît dans l'incendie de l'Hôtel du Vélan au Col des Planches en février 1944.

 

Les gisements - Le plomb et la fluorine